Le Lundi, c’est poésie ! Art poétique de P.Verlaine

De la musique avant toute chose,
Et pour cela préfère l’Impair
Plus vague et plus soluble dans l’air,
Sans rien en lui qui pèse ou qui pose.

Il faut aussi que tu n’ailles point
Choisir tes mots sans quelque méprise :
Rien de plus cher que la chanson grise
Où l’Indécis au Précis se joint.

C’est des beaux yeux derrière des voiles,
C’est le grand jour tremblant de midi,
C’est, par un ciel d’automne attiédi,
Le bleu fouillis des claires étoiles !


Car nous voulons la Nuance encor,
Pas la Couleur, rien que la nuance !
Oh ! la nuance seule fiance
Le rêve au rêve et la flûte au cor !

Fuis du plus loin la Pointe assassine,
L’Esprit cruel et le Rire impur,
Qui font pleurer les yeux de l’Azur,
Et tout cet ail de basse cuisine !

Prends l’éloquence et tords-lui son cou !
Tu feras bien, en train d’énergie,
De rendre un peu la Rime assagie.
Si l’on n’y veille, elle ira jusqu’où ?

O qui dira les torts de la Rime ?
Quel enfant sourd ou quel nègre fou
Nous a forgé ce bijou d’un sou
Qui sonne creux et faux sous la lime ?

De la musique encore et toujours !
Que ton vers soit la chose envolée
Qu’on sent qui fuit d’une âme en allée
Vers d’autres cieux à d’autres amours.

Que ton vers soit la bonne aventure
Eparse au vent crispé du matin
Qui va fleurant la menthe et le thym…
Et tout le reste est littérature.

Paul Verlaine

Recueil : Jadis et naguère (1884).


Ce billet  entre dans le cadre du défi « Le Printemps des Artistes » proposé par Marie-Anne du blog  » La Bouche à Oreilles d’avril à juin 2023

Je ne peux pas finir cette poésie sans vois offrir en ce 1 mai un joli bouqutt de muguet.

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Le Lundi, c’est poésie, Le Mois Latino-Américain

Un nouveau pays, le Venezuela

Drapeau du Venezuela.Adopté en 1811. Le jaune représente les richesses du pays ; le bleu, la liberté (l’océan séparant le Venezuela de l’Espagne) ; le rouge, le sang versé par les patriotes. Sept étoiles apparurent en 1817, symbolisant les provinces qui constituaient l’État au moment de l’indépendance ; une huitième a été ajoutée en 2006 en hommage à S. Bolívar.

État d’Amérique du Sud, le Venezuela possède au nord et au nord-ouest une longue façade maritime sur l’océan Atlantique (mer des Antilles) ; il est limité à l’est par le Guyana, au sud par le Brésil, à l’ouest par la Colombie.
Le Venezuela est membre de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (O.P.E.P.).


C’est un État fédéral, qui se compose d’un District fédéral et de 22 États : Amazonas, Anzoátegui, Apure, Aragua, Barinas, Bolívar, Carabobo, Cojedes, Delta Amacuro, Falcón, Guárico, Lara, Mérida, Miranda, Monagas, Nueva Esparta, Portuguesa, Sucre, Táchira, Trujillo, Yaracuy et Zulia.

Pour terminer ce mois, place à une femme, Diana Lichy

ANGÉLUS

L’après-midi s’épanouit sur ma fenêtre.

Le vent, frôle les feuilles
en leur déployant des ailes.

pendant que la ville est bercée par le vent
avec un chant de crissement frais.
La terre baignée par la pluie de souvenirs
qui restent scellés à ma peau,
        ses lèvres sur mes paupières,
   embrassées par le bonheur.
Étourdie de la vie.

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La nuit s’échappe.

La nuit s’échappe
Par les mailles de notre hamac

Les étoiles prennent congé sous tes paupières

Le soleil
Commence à aiguiser
L’ombre des arbres

Et l’odeur du café
Met le rêve à nu

A l’instant où se cristallise ce poème

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Oasis

L’écriture est un mirage
Vers lequel nous avançons
Fébrilement.

Mais l’oasis,
Comme le poème parfait
est toujours ailleurs.

Diana LICHY est née à Caracas, Venezuela, le 31 août 1960. Elle vit à Paris depuis 1993.

Elle a publié les recueils de poésie suivants : « En los extremos confines de tu cuerpo », PEN CLUB, Venezuela, 1989, « Solasombro », Gobernación de Bolívar, 1993, « Solitario oficio de horas desnudas », FUNDARTE, Caracas, 1993, « Sortilegios », poèmes, FUNDARTE, Caracas, 1996, « Sortileges », Éditions Indigo, Paris 1998. En 2000, elle fait partie de l’anthologie « Palabras de Mujer », Mexico. Elle a publié une « Anthologie de la poésie vénézuélienne du XXème siècle », Éditions Patiño, Genève 2002.

Poésie dans le cadre du mois latino organisé par Ingannmic.

Lundi, c’est poésie !!

Il fait froid

L’hiver blanchit le dur chemin
Tes jours aux méchants sont en proie.
La bise mord ta douce main ;
La haine souffle sur ta joie.

La neige emplit le noir sillon.
La lumière est diminuée…
Ferme ta porte à l’aquilon !
Ferme ta vitre à la nuée !

Et puis laisse ton cœur ouvert !
Le cœur, c’est la sainte fenêtre.
Le soleil de brume est couvert ;
Mais Dieu va rayonner peut-être !

Doute du bonheur, fruit mortel ;
Doute de l’homme plein d’envie ;
Doute du prêtre et de l’autel ;
Mais crois à l’amour, ô ma vie !

Crois à l’amour, toujours entier,
Toujours brillant sous tous les voiles !
A l’amour, tison du foyer !
A l’amour, rayon des étoiles !

Aime, et ne désespère pas.
Dans ton âme, où parfois je passe,
Où mes vers chuchotent tout bas,
Laisse chaque chose à sa place.

La fidélité sans ennui,
La paix des vertus élevées,
Et l’indulgence pour autrui,
Eponge des fautes lavées.

Dans ta pensée où tout est beau,
Que rien ne tombe ou ne recule.
Fais de ton amour ton flambeau.
On s’éclaire de ce qui brûle.

A ces démons d’inimitié
Oppose ta douceur sereine,
Et reverse leur en pitié
Tout ce qu’ils t’ont vomi de haine.

La haine, c’est l’hiver du cœur.
Plains-les ! mais garde ton courage.
Garde ton sourire vainqueur ;
Bel arc-en-ciel, sors de l’orage !

Garde ton amour éternel.
L’hiver, l’astre éteint-il sa flamme ?
Dieu ne retire rien du ciel ;
Ne retire rien de ton âme !

Victor Hugo

La photo provient de Pixabay

Le Lundi, c’est poésie !!

Décembre

(Les hôtes)

– Ouvrez, les gens, ouvrez la porte,
je frappe au seuil et à l’auvent,
ouvrez, les gens, je suis le vent,
qui s’habille de feuilles mortes.

– Entrez, monsieur, entrez, le vent,
voici pour vous la cheminée
et sa niche badigeonnée ;
entrez chez nous, monsieur le vent.

– Ouvrez, les gens, je suis la pluie,
je suis la veuve en robe grise
dont la trame s’indéfinise,
dans un brouillard couleur de suie.

– Entrez, la veuve, entrez chez nous,
entrez, la froide et la livide,
les lézardes du mur humide
s’ouvrent pour vous loger chez nous.

– Levez, les gens, la barre en fer,
ouvrez, les gens, je suis la neige,
mon manteau blanc se désagrège
sur les routes du vieil hiver.

– Entrez, la neige, entrez, la dame,
avec vos pétales de lys
et semez-les par le taudis
jusque dans l’âtre où vit la flamme.

Car nous sommes les gens inquiétants
qui habitent le Nord des régions désertes,
qui vous aimons – dites, depuis quels temps ? –
pour les peines que nous avons par vous souffertes.

Emile Verhaeren

Lundi, c’est poésie ! Rêve de Paul Verlaine

Je renonce à la poésie !

Je vais être riche demain.

A d’autres je passe la main :

Qui veut, qui veut m’être un
Sosie ?

Bel emploi, j’en prends à témoin
Les bonnes heures de balade
Où, rimaillant quelque ballade,
Je passais mes nuits tard et loin.

Sous la lune lucide et claire


Les ponts luisaient insidieux.

L’eau baignait de flots gracieux
Paris gai comme un cimetière.

Je renonce à tout ce bonheur
Et je lègue aux jeunes ma lyre !
Enfants, héritez mon délire,
Moi j’hérite un sac suborneur.

Paul Verlaine

Le Mois Anglais, Wild strawberries de Helen Dunmore

Wild strawberries

What I get I bring home to you:
a dark handful, sweet-edged,
dissolving in one mouthful.

I bother to bring them for you
though they’re so quickly over,
pulpless, sliding to juice

a grainy rub on the tongue 
and the taste’s gone. If you remember
we were in the woods at wild strawberry time

and I was making a basket of dockleaves
to hold what you’d picked, 
but the cold leaves unplaited themselves

and slid apart, and again unplaited themselves
until I gave up and ate wil strawberries
out of your hands for sweetness.

I lipped at your palm –
the little salt edge there,
the tang of money you’d handled.

As we stayed in the wood, hidden,
we heard the sound system below us
calling the winners at Chepstow,
faint as the breeze turned.

The sun came out on us, the shade blotches
went hazel : we heard names
bubble like stock-doves over the woods

as jockeys in stained silks gentled
those sweat-dark, shuddering horses
down to the walk

from Out of the Blue, New & Selected Poems (Bloodaxe Books, 2001), © Helen Dunmore 2001

Helen Dunmore, née le 12 décembre 1952 à Beverley (Royaume-Uni) et morte le 5 juin 2017 à Bristol (Royaume-Uni), est une écrivaine britannique.


Sculpture et Peinture en Poésie de Louis Fontas

Un habile sculpteur détache de la pierre
En s’aidant d’un burin, d’innombrables lambeaux,
Pour créer la statue d’une vierge en guêpière,
Élevant vers le ciel ses lumineux flambeaux.

Dans les musées des mots, trésors de la culture,
Un Poète en secret promène ses désirs,
Impatient d’exploiter les dons que la nature
Offre à tous les Humains en quête de plaisirs.

L’imagination, en outil pictural,
Multiplie les croquis pour parfaire l’épure,
Estimant précieux tout produit scriptural
Qui ne s’envole point comme une offense impure.

Ainsi, la Poésie s’inscrit dans l’art parfait ;
La rythmique des mots anime un bon poème,
Enrichissant l’esprit d’un musical bienfait,
Sculpturale splendeur d’une brillante gemme !

Louis Fontas

Louis FONTAS est né le 28 septembre 1920 à Cazouls-d’Hérault (Hérault). Licencié en droit, il est ancien élève des T.P.E. (Paris), ancien assistant physicien au laboratoire de l’École Nationale des Ponts et Chaussées à Paris, ancien commissaire aux Enquêtes Économiques à Paris, ex-membre de l’Organisation Civile et Militaire. Il a passé la grande majorité de sa vie professionnelle à la Direction de Centres Hospitaliers à Paris et en Province. Il a été membre de plusieurs commissions nationales au Ministère de la Santé.

Il est Officier de l’Ordre National du Mérite et Officier des Palmes Académiques. Malgré une formation et une activité professionnelle à forte empreinte technique et scientifique, Louis FONTAS est un poète authentique et il écrit depuis l’adolescence.

Ce poème entre dans le cadre du défi « Le Printemps des Artistes » proposé par Marie-Anne du blog  » La Bouche à Oreilles d’avril à juin 2022.

Femme noire de Leopold Sedar Senghor

Femme nue, femme noire
Vêtue de ta couleur qui est vie, de ta forme qui est beauté
J’ai grandi à ton ombre; la douceur de tes mains bandait mes yeux
Et voilà qu’au coeur de l’Été et de Midi,
Je te découvre, Terre promise, du haut d’un haut col calciné
Et ta beauté me foudroie en plein coeur, comme l’éclair d’un aigle

Femme nue, femme obscure
Fruit mûr à la chair ferme, sombres extases du vin noir, bouche qui fais lyrique ma bouche
Savane aux horizons purs, savane qui frémis aux caresses ferventes du Vent d’Est
Tamtam sculpté, tamtam tendu qui gronde sous les doigts du vainqueur
Ta voix grave de contralto est le chant spirituel de l’Aimée

Femme noire, femme obscure
Huile que ne ride nul souffle, huile calme aux flancs de l’athlète, aux flancs des princes du Mali
Gazelle aux attaches célestes, les perles sont étoiles sur la nuit de ta peau.
Délices des jeux de l’Esprit, les reflets de l’or ronge ta peau qui se moire
A l’ombre de ta chevelure, s’éclaire mon angoisse aux soleils prochains de tes yeux.

Femme nue, femme noire
Je chante ta beauté qui passe, forme que je fixe dans l’Éternel
Avant que le destin jaloux ne te réduise en cendres pour nourrir les racines de la vie.

Demain de Pedro Salinas

« Demain » Le mot allait, délié, vacant,
sans poids dans le vent,
si dénué d’âme et de corps,
de couleur, de baiser,
que je l’ai laissé passer
près de moi aujourd’hui.
Mais soudain toi
tu as dit : « Moi, demain… »
Et tout se peuple
de chair et de bannières.
Sur moi se précipitaient
les promesses
aux six cents couleurs,
avec des robes à la mode,
nues, mais toutes
chargées de caresses.
En train ou en gazelles
m’arrivaient -aigus,
sons de violons-
des espoirs ténus
de bouches virginales.
Ou rapides et grandes
comme des navires, de loin, comme des baleines
depuis des mers distantes,
d’immenses espérances
d’un amour sans final.
Demain ! Quel mot
vibrant, tendu
d’âme et de chair rose,
corde de l’arc
où tu posas, si effilée,
arme de vingt années,
la flèche la plus sûre
lorsque tu dis : « Moi…. »
Recueil “La voix qui t’est due”
Traduction Bernard Sesé
La tête à l’envers
Promenade au bord de la mer (en espagnol : Paseo a orillas del mar) est le tableau le plus célèbre de Joaquín Sorolla, qui l’a peint durant l’été 1909 à Valence. Il est conservé au musée Sorolla de Madrid. (source Wikipédia)