La fille aux papillons de René Denfeld

En enquêtant sur la disparition de sa sœur, Naomi, « la femme qui retrouvait les enfants », croise le chemin d’une fille des rues de Portland nommée Celia. Naomi tente de faire reconnaître le viol dont a été victime Celia et remonte la trace d’une série de meurtres de jeunes filles. Un roman réaliste et sensible sur le monde de l’enfance meurtrie.

 

 

Une écriture agréable et poétique nous permet d’aborder des sujets graves. D’un côté, Célia, une jeune adolescente qui s’est enfuie de chez elle, vit dans la peur chaque minute de sa vie. Elle a laissé une mère alcoolique, un beau-père qui lui a fait subir la pire des choses, et sa petite sœur. Celle-ci , elle veut la sauver malgré tout. Célia vit dans la rue , aux côtés de jeunes comme elle,tel que Rich et la Défonse, ils vont s’épauler les uns et les autres.

Célia arrive à s’évader de ce contexte, en se rendant dès qu’elle le peut à la bibliothèque. Là elle prend toujours le même livre, un livre sur les papillons. La bibliothécaire lui donne du papier et un crayon.  Elle dessine de jolis papillons, qu’elle imagine voleter autour d’elle. Un moment magique pour elle, où elle oublie l’univers dans lequel elle vit.

« Elle qui ne croyait en rien d’autre qu’à elle-même, et aux papillons savait que les pires terreurs de la rue sont toujours réelles. »

De l’autre, Naomi  recherche sa sœur disparue depuis vingt ans. Elle va croiser la route de Célia, cette jeune affamée, abandonnée dans les rues. Naomi enquête dans cette ville de Portland où des jeunes filles disparaissent, puis sont retrouvées quelques jours plus tard, noyées dans la rivière.

les deux histoires vont se croiser, les avis de Célia et Naomi vont se chevaucher. L’auteur sait créer un courant d’empathie autour de Célia avec les enfants des rues et de Naomi. Malgré les situations tragiques , il y a toujours une once d’espoir même minime de découvrir la vérité.

Je vous recommande cette lecture.

La fille aux  papillons Rene Denfeld

EAN : 9782743650193
Éditeur : Payot et Rivages (01/04/2020)
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Femme noire de Leopold Sedar Senghor

Femme nue, femme noire
Vêtue de ta couleur qui est vie, de ta forme qui est beauté
J’ai grandi à ton ombre; la douceur de tes mains bandait mes yeux
Et voilà qu’au coeur de l’Été et de Midi,
Je te découvre, Terre promise, du haut d’un haut col calciné
Et ta beauté me foudroie en plein coeur, comme l’éclair d’un aigle

Femme nue, femme obscure
Fruit mûr à la chair ferme, sombres extases du vin noir, bouche qui fais lyrique ma bouche
Savane aux horizons purs, savane qui frémis aux caresses ferventes du Vent d’Est
Tamtam sculpté, tamtam tendu qui gronde sous les doigts du vainqueur
Ta voix grave de contralto est le chant spirituel de l’Aimée

Femme noire, femme obscure
Huile que ne ride nul souffle, huile calme aux flancs de l’athlète, aux flancs des princes du Mali
Gazelle aux attaches célestes, les perles sont étoiles sur la nuit de ta peau.
Délices des jeux de l’Esprit, les reflets de l’or ronge ta peau qui se moire
A l’ombre de ta chevelure, s’éclaire mon angoisse aux soleils prochains de tes yeux.

Femme nue, femme noire
Je chante ta beauté qui passe, forme que je fixe dans l’Éternel
Avant que le destin jaloux ne te réduise en cendres pour nourrir les racines de la vie.

L’appel de la forêt de Jack London

Admiré par tous et choyé par son maître, le chien Buck n’a vraiment pas de raison de se méfier des humains. Un homme va pourtant l’arracher à son foyer ; un autre va lui enseigner la dure loi du plus fort. Devenu chien de traîneau, Buck découvre la violence, le goût du sang. Des rivalités déchirent la meute dont il fait maintenant partie. Alors que Buck s’éloigne de la civilisation, une voix venue de la forêt éveille dans sa mémoire l’appel de la forêt, puissant, irrésistible…

J’ai participé avec plaisir lors du confinement à une lecture commune organisée par Babelio.  En plus, il y a eu la rencontre virtuelle avec ceux qui l’avaient lu. Ce fut un échange intéressant. Avant de participer , j’ai dû télécharger ce livre et le lire.

Buck est un chien, un croisé saint-bernard et berger écossais, qui passe des jours heureux auprès d’un maître attentionné. Il vit en Californie jusqu’au jour où sa vie bascule .

Il va être volé, et va devoir partir malgré lui pour servir ceux qui recherchent de l’or. Et pour conduire leurs aventures, ils ont besoin de chiens de traineau. Buck fera parti du voyage, vers l’Alaska. Buck va être battu, non reconnu parmi les autres chiens. Il va apprendre à se battre pour assurer sa survie.

Sous son pelage, habitué aux caresses, sa vraie nature reprendra le dessus.

Jack London met bien en valeur la campagne, les paysages enneigés de l’Alaska en hiver. Toute la nature est bien représentée. On peut apprécier cette vie qui est rude dans le grand nord. La synergie chiens-hommes est indispensable pour parcourir les territoires désolés et humaniser ces grands espaces.

On s’aperçoit  à la fin du livre que ce chien qui avait toutes les caractéristiques d’un chien, va revenir à sa première nature, à sa première origine : le loup. redevenu libre, répondra à l’appel de la forêt.

lu en numérique

 

Les deux amitiés de Marceline Desbordes-Valmore

Il est deux Amitiés comme il est deux Amours.
L’une ressemble à l’imprudence ;
Faite pour l’âge heureux dont elle a l’ignorance,
C’est une enfant qui rit toujours.
Bruyante, naïve, légère,
Elle éclate en transports joyeux.
Aux préjugés du monde indocile, étrangère,
Elle confond les rangs et folâtre avec eux.
L’instinct du cœur est sa science,
Et son guide est la confiance.
L’enfance ne sait point haïr ;
Elle ignore qu’on peut trahir.
Si l’ennui dans ses yeux (on l’éprouve à tout âge)
Fait rouler quelques pleurs,
L’Amitié les arrête, et couvre ce nuage
D’un nuage de fleurs.
On la voit s’élancer près de l’enfant qu’elle aime,
Caresser la douleur sans la comprendre encor,
Lui jeter des bouquets moins riants qu’elle-même,
L’obliger à la fuite et reprendre l’essor.

C’est elle, ô ma première amie !
Dont la chaîne s’étend pour nous unir toujours.
Elle embellit par toi l’aurore de ma vie,
Elle en doit embellir encor les derniers jours.
Oh ! que son empire est aimable !
Qu’il répand un charme ineffable
Sur la jeunesse et l’avenir,
Ce doux reflet du souvenir !
Ce rêve pur de notre enfance
En a prolongé l’innocence ;
L’Amour, le temps, l’absence, le malheur,
Semblent le respecter dans le fond de mon cœur.
Il traverse avec nous la saison des orages,
Comme un rayon du ciel qui nous guide et nous luit :
C’est, ma chère, un jour sans nuages
Qui prépare une douce nuit.

L’autre Amitié, plus grave, plus austère,
Se donne avec lenteur, choisit avec mystère ;
Elle observe en silence et craint de s’avancer ;
Elle écarte les fleurs, de peur de s’y blesser.
Choisissant la raison pour conseil et pour guide,
Elle voit par ses yeux et marche sur ses pas :
Son abord est craintif, son regard est timide ;
Elle attend, et ne prévient pas.

Marceline Desbordes-Valmore.

Et toujours les forêts de Sandrine Collette

   Corentin, personne n’en voulait. Ni son père envolé, ni les commères dont les rumeurs abreuvent le village, ni surtout sa mère, qui rêve de s’en débarrasser. Traîné de foyer en foyer, son enfance est une errance. Jusqu’au jour où sa mère l’abandonne à Augustine, l’une des vieilles du hameau. Au creux de la vallée des Forêts, ce territoire hostile où habite l’aïeule, une vie recommence….

 

le Grand Prix RTL-Lire 2020 a été décerné  à Sandrine Collette pour Et toujours les forêts, paru en janvier chez JC Lattès. Elle avait déjà été récompensée il y a deux semaines par le prix de la Closerie des Lilas pour ce roman de fin du monde. 

Corentin a été balloté dans des familles d’accueil jusqu’au jour où sa mère décide de le confier à  la vieille Augustine,la grand-mère du père de Corentin. Elle habite dans un petit hameau de la vallée des Forêts.

« Un territoire à part, colossal, charnu d’arbres centenaires, de chemins qui s’effaçaient chaque saison sous la force de la nature. Un territoire maléfique, disaient certains qui ne savaient plus pourquoi, mais c’était un réflexe, chaque fois qu’un malheur s’abattait par ici, les vieilles et les vieux se tordaient les mains en hochant la tête : ce sont les Forêts. »

Il trouvera un peu de répit, il grandira puis un jour partira faire ses études à la ville. Il vivra sa vie de jeune étudiant, participera à des fêtes souvent bien arrosées, qui ont lieu dans des caves souterraines.

Lors d’une de ces fêtes, un bruit se fit entendre, un tremblement de terre ? Chacun se fige. Ils remontent à la surface et découvrent des corps , les hommes et les animaux sont brûlés vifs. Tout autour d’eux n’est plus que ruine.

Corentin décide de quitter ce lieu et va tenter de retrouver sa vieille Augustine.

Ce roman bascule dans le post-apocalyptique, le monde n’est plus. Avec quoi peut-on envisager de reconstruire quelquechose, s’il n’y a plus rien ? Peut-on en créer un nouveau ? Voici quelques questions évoquées par Sandrine Collette dans ce roman noir, à travers le destin tragique de Corentin. Elle va s’intéresser à la vie d’après lorsqu’on a tout perdu et qu’il faut tout reconstruire.

Le rythme est lent, pour mieux appréhender Corentin, ses sensations, sa rage de vivre en insistant sur la nécessité de vivre, ou plutôt de survivre.

C’est ma première rencontre avec Sandrine Collette, et je peux dire que cela ne sera pas la dernière. Ce roman est un beau roman noir, sur des questions existentielles.

Et toujours les Forêts » – Sandrine Collette – JC Lattès – 334 pages

Liberté de Paul Eluard

Sur mes cahiers d’écolier
Sur mon pupitre et les arbres
Sur le sable sur la neige
J’écris ton nom

Sur toutes les pages lues
Sur toutes les pages blanches
Pierre sang papier ou cendre
J’écris ton nom

Sur les images dorées
Sur les armes des guerriers
Sur la couronne des rois
J’écris ton nom

Sur la jungle et le désert
Sur les nids sur les genêts
Sur l’écho de mon enfance
J’écris ton nom

Sur les merveilles des nuits
Sur le pain blanc des journées
Sur les saisons fiancées
J’écris ton nom

Sur tous mes chiffons d’azur
Sur l’étang soleil moisi
Sur le lac lune vivante
J’écris ton nom

Sur les champs sur l’horizon
Sur les ailes des oiseaux
Et sur le moulin des ombres
J’écris ton nom

Sur chaque bouffée d’aurore
Sur la mer sur les bateaux
Sur la montagne démente
J’écris ton nom

Sur la mousse des nuages
Sur les sueurs de l’orage
Sur la pluie épaisse et fade
J’écris ton nom

Sur les formes scintillantes
Sur les cloches des couleurs
Sur la vérité physique
J’écris ton nom

Sur les sentiers éveillés
Sur les routes déployées
Sur les places qui débordent
J’écris ton nom

Sur la lampe qui s’allume
Sur la lampe qui s’éteint
Sur mes maisons réunies
J’écris ton nom

Sur le fruit coupé en deux
Du miroir et de ma chambre
Sur mon lit coquille vide
J’écris ton nom

Sur mon chien gourmand et tendre
Sur ses oreilles dressées
Sur sa patte maladroite
J’écris ton nom

Sur le tremplin de ma porte
Sur les objets familiers
Sur le flot du feu béni
J’écris ton nom

Sur toute chair accordée
Sur le front de mes amis
Sur chaque main qui se tend
J’écris ton nom

Sur la vitre des surprises
Sur les lèvres attentives
Bien au-dessus du silence
J’écris ton nom

Sur mes refuges détruits
Sur mes phares écroulés
Sur les murs de mon ennui
J’écris ton nom

Sur l’absence sans désir
Sur la solitude nue
Sur les marches de la mort
J’écris ton nom

Sur la santé revenue
Sur le risque disparu
Sur l’espoir sans souvenir
J’écris ton nom

Et par le pouvoir d’un mot
Je recommence ma vie
Je suis né pour te connaître
Pour te nommer

Liberté.

Paul Eluard

Poésie et vérité 1942 (recueil clandestin)

 

Printemps du Livre de Grenoble

Le Printemps du livre de Grenoble se tient en LIGNE les samedi 9 et dimanche 10 mai.

Hier soir , j’ai écouté la Rencontre avec Bérengère Cournut  et Fanette Arnaud dans le cadre du Printemps du livre 2020.
Pour son roman De pierre et d’os (Le Tripode, 2019). 

Cliquez sur la photo pour lire ma critique.

Vœux simples de Cécile Sauvage

Vœux simples

Vivre du vert des prés et du bleu des collines,
Des arbres  racineux qui grimpent aux ravines,
Des ruisseaux éblouis de l’argent des poissons ;
Vivre du cliquetis allègre des moissons,
Du clair halètement des sources remuées,
Des matins de printemps qui soufflent leurs buées,
Des octobres semeurs de feuilles et de fruits
Et de l’enchantement lunaire au long des nuits
Que disent les crapauds sonores dans les trèfles.
Vivre naïvement de sorbes et de nèfles,
Gratter de la spatule une écuelle en bois,
Avoir les doigts amers ayant gaulé des noix
Et voir, ronds et crémeux, sur l’émail des assiettes,
Des fromages caillés couverts de sarriettes.
Ne rien savoir du monde où l’amour est cruel,
Prodiguer des baisers sagement sensuels
Ayant le goût du miel et des roses ouvertes
Ou d’une aigre douceur comme les prunes vertes
À l’ami que bien seule on possède en secret.
Ensemble recueillir le nombre des forêts,
Caresser dans son or brumeux l’horizon courbe,
Courir dans l’infini sans entendre la tourbe
Bruire étrangement sous la vie et la mort,
Ignorer le désir qui ronge en vain son mors,
La stérile pudeur et le tourment des gloses ;
Se tenir embrassés sur le néant des choses
Sans souci d’être grands ni de se définir,
Ne prendre de soleil que ce qu’on peut tenir
Et toujours conservant le rythme et la mesure
Vers l’accomplissement marcher d’une âme sûre.
Voir sans l’interroger s’écouler son destin,
Accepter les chardons s’il en pousse en chemin,
Croire que le fatal a décidé la pente
Et faire simplement son devoir d’eau courante.
Ah ! vivre ainsi, donner seulement ce qu’on a,
Repousser le rayon que l’orgueil butina,
N’avoir que robe en lin et chapelet de feuilles,
Mais jouir en son plein de la figue qu’on cueille,
Avoir comme une nonne un sentiment d’oiseau,
Croire que tout est bon parce que tout est beau,
Semer l’hysope franche et n’aimer que sa joie
Parmi l’agneau de laine et la chèvre de soie.

Cécile Sauvage, Tandis que la terre tourne

 

Cécile Sauvage, « poétesse de la maternité », est une femme de lettres française, née à La Roche-sur-Yon le et morte à Paris le .

Elle vécut la majeure partie de sa vie à Saint-Étienne et écrit chaque jour à sa petite table de bois blanc tachée d’encre. Elle découvre les poètes anglais, notamment dont le vers La poésie de la terre ne meurt jamais semble être écrit pour illustrer la poésie de Cécile Sauvage.

Elle s’éteint à l’Hôtel-Dieu de Paris le , dans les bras de son époux et de ses fils. ( source Wikipédia)

 

Petites Tranches Poétiques

Il faut bien s’occuper pendant ce temps de confinement, alors je vous propose de participer à ce petit jeu. Cette semaine, je suis en vacances, le télétravail recommence la semaine prochaine . La page Facebook de « Improbables Librairies, improbables bibliothèques  » .

est initiatrice de ce jeu, une autre page a été crée pour ces Petites Tranches Poétiques.

Regardez, avec quelques livres ce que vous pouvez faire :

Même les enfants peuvent le faire:

J’ai cherché quelques livres, cela permet de retrouver quelques pépites..

Maintenant , à vous de jouer !!!

J’ai reçu une proposition de Patou45

Merci d’avoir participé !